Tarbes - Karakoram Highway - Tarbes

Tarbes, 22/02/02 9H00

Départ de Christian, le début du voyage commence. bon voyage mon frère.

Grèce Météores, 26/02/02



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Ankara (Turquie) 28/02/02

JE L'AI!!!! J'ai obtenu mon visa iranien en 7 heures sans avoir à utiliser une arme ni à devoir faire don de mon corps. Je le trouve très beau ce petit rectangle au milieu de mon passeport; bon, d'accord, ce n'est pour le moment qu'un visa de transit mais j'ai enfin vu s'ouvrir une grille devant moi, ce qui fait que je peux raisonnablement penser aller jusqu'à Katmandou.
Comme une bonne nouvelle n'arrive jamais seule, j'ai fait la rencontre d'un couple franco-turc qui m'a gentiment invité chez lui. J'ai posé tout mon barda chez eux....pour repartir cinq minutes plus tard à un concert exceptionnel de musique tsigane. La soirée s'est terminée très tard à discuter de voyages, Medar étant lui même motard ....et transalpiste ce qui ne gâte rien.
Ma première semaine fut un long marathon car je voulais savoir rapidement de quoi serait fait mon voyage; j'ai roulé, roulé comme je sais le faire quand le besoin s'en fait sentir et cela m'a aidé à m'approprier mon voyage. Trois mille kilomètres déjà.
Dans deux heures, je quitte mes nouveaux amis, direction la Cappadocce puis la côte méditerranéenne avant d'attaquer le sud-est turc. Le début du voyage a été si intense que j'ai l'impression d'avoir quitté la France depuis un mois.
De la fatigue mais aussi beaucoup de bonheur.
A bientôt.
Christian

Göreme (Turquie), 06/03/02



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J'ai un peu tourné en rond ces derniers jours ( au propre comme au figuré), en allant de Göreme à Alanya et retour (1400 kilomètres quand même!), mais demain, c'est le grand départ pour la Turquie orientale; si tout va bien, je dormirai demain soir à SanliUrfa, ville qui a eu notamment la visite d'Abraham. Ensuite, je pense m'arrêter à Batman ( oui, Batman pas Superman) et enfin au bord du lac Van avant de franchir la frontière iranienne. Tout ça, c'est sur le papier et les circonstances du voyage décideront de la véritable tournure des évènements. Il fait très froid en Turquie! J'ai souffert sous la tente cette nuit et j'ai raisonnablement trouvé une pension pour être en pleine forme avant l'étape de demain. Titine se porte bien, pourvu que ça dure! Au fait même si ça caille la nuit, la journée, c'est soleil, soleil, soleil. Bisous turcs. Portez vous bien.Christian.

Tatvan (Turquie), 08/03/02

A 1700 mètres d'altitude,Tatvan, au bord du lac Van, aux portes de l'Iran, est entouré par la neige. Le soleil regagne doucement la maison pour la nuit. J'ai changé de pays depuis deux jours.

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Ici, c'est le pays kurde et l'atmosphère y est plus orientale, plus chaleureuse aussi, malgré la présence soutenue des militaires ( cherchez l'erreur....); le paysage aussi est plus "sauvage" et aujourd'hui, je me suis senti loin, très loin de Tarbes. Les rencontres se multiplient malgré la barrière de la langue et ça me porte un peu plus en avant dans mon voyage. Demain, peut-être, je rentrerai en Iran, un moment fort, mais il y a encore un col à 2700 mètres à passer; les Pyrénées, à côté, ce sont de paisibles collines! Titine tourne comme une montre, heureusement vu mes talents connus de mécanicien hors pair! Pour la sympathique équipe de Toulouse, la suspension arrière "fournalesse" bien sur les routes défoncées et mon dos lui en est très reconnaissant. Lionel, où es tu? Ai je l'espoir de te rencontrer en Iran ou en resterons nous au stade de l'internet? Ce fut une grande et belle journée aujourd'hui , une de celles qui font dire que ce voyage ira jusqu'au bout; ce n'est peut être pas très rationnel, mais que ça fait du bien dans la tête!

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Plein de bisous. Christian

Téhéran (Iran), 11/03/02

Téhéran: 22 heures (19h30 en France)

Le voyage se poursuit....

Samedi, une petite contrariété à la base, une route sur une carte qui n'existe en fait pas et mon étape "tranquille" devient grandiose. La route s'engage dans la montagne, toujours plus haut. Le froid s'installe avec un vent glacial. J'avais déjà eu des impressions de "bout du monde" dans les immensités du désert algérien notamment, en montagne jamais jusqu'à ce jour . La route semblait s'enfoncer à jamais dans la montagne, la neige etait omniprésente. C'était féerique et j'ai vraiment eu le sentiment d'atteindre le bout de la Turquie ce samedi 9 mars; un grand moment.

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Puis, ce fut le passage de la frontière dans un poste perdu où j'ai été longuement questionné par les douaniers.... devant un rafraîchissement et des friandises dans une ambiance bon enfant; au passage, tout ce que je transportais ne les a aucunement intéressés.

Ensuite, c'est un grand changement qui s'opère. Un autre monde.
Les premiers kilomètres, j'étais impressionné par le nombre d'épaves ambulantes en circulation, notamment les nombreuses Paykan, la voiture nationale, encore plus laides en vrai qu'en photo, ce qui n'est pas peu dire! Je suis sûr que, dans les maisons, les mères disent aux enfants qui ne veulent pas terminer leur repas: "Si tu ne finis pas ta soupe, ton père va t'emmener faire un tour en Paykan!"

Choc pétrolier à la première station: le litre d'essence perd 17 fois sa valeur et j'ai retrouvé le plaisir des pleins à 5 francs comme en Libye.

Tout d'un coup, je me retrouve illettré, analphabète devant toutes les indications en farsi; heureusement, les Iraniens sont très serviables et il y en a toujours un pour aider le pauvre motard en détresse

Quant à la conduite automobile, elle est très, très particulière. Heureusement, j'ai une bonne formation en la matière: le diplôme de base avec Naples en 1981; puis Athènes en 1984 ( là, le niveau s'élève!), la même année, une formation plus longue à savoir la traversée de la Yougoslavie du nord au sud et retour ( un sacré souvenir!); Istanbul en 1988 et enfin le nec plus ultra, Le Caire en 1998 qui est un des plus grands centres de formation des candidats au suicide, heu pardon, à la conduite automobile.

Quant à Titine, alias Mme Transalp, elle est en train d'attraper la grosse tête; à chaque arrêt, elle est l'objet de toutes les attentions, on lui tourne autour, on l'examine sous toutes les coutures, on commente, on s'extasie; je la surprends parfois qui en rougit de plaisir!

Trois jours en Iran et une constatation: une grande gentillesse des habitants ..... et un froid sibérien ( -5 degrés ce matin en chargeant la moto!). Depuis le départ, je bénis chaque jour mes manchons, mes poignées chauffantes et ma combinaison de pluie.

Demain, repos. Pas trop tôt, diront certains et ils n'ont pas tout a fait tort. Et passage au bureau chargé de l'extension de mon visa. J'ai confiance, j'ai vraiment envie de me poser ici.

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A bientôt. Christian

Téhéran 12/03/02

"Nous n'accordons pas d'extension de visa de transit" m'a annoncé le fonctionnaire il y a 3 heures. Gloups! Deux fois que l'Iran se refuse à moi. Le moral en a pris un sacré coup et je suis un peu KO debout à l'heure où je vous écris. Le 15, mon visa expire et je peux avoir éventuellement une extension de quelques jours en cas de dépassement mais uniquement accordée près de la frontière. Pas simple tout ça! Donc, soit je fonce vers le Pakistan, distant de 2000 kilomètres mais je commence à fatiguer et j'ai vraiment envie de me poser, soit je retourne en Turquie essayer d'obtenir un visa tourisme à Ankara ( ça fait un beau détour). Je n'ai pas d'autre solution et il va falloir se décider rapidement. Après l'Europe et la libre circulation des personnes, qu'attend t'on pour créer le monde libre; je suis en train de haïr les frontières! Sinon, la santé est bonne comme on dit... La suite au prochain numéro.

Salinurfa (Turquie), 16/03/02

Hier, j'étais sur le point de conclure mon long message de Tatvan par " Je vous laisse, il commence à neiger et je vais mettre les chaines sur la moto" quand la liaison a été coupée et tout mon texte par la même occasion! Avec internet, c'est tout ou rien.

Et, ce matin, Tatvan était blanc....comme neige et moi un peu plus vert en pensant à l'état de la route. J'ai donc modifié mon itinéraire ( je ne suis pas à un détour près!) et pris une route plus au sud qui m'a amené jusqu'à Urfa.

Ma moto est extraordinaire; je le savais déjà mais elle m'a montré depuis mercredi une nouvelle facette à son immense talent; en plus de toutes ses caractéristiques techniques, elle possède une marche arrière. Non? Si! Ainsi, nous roulons de cette nouvelle manière depuis notre départ de Téhéran, mercredi matin, cela fait aujourd'hui 1900 kilomètres. Seul inconvénient, mais de taille, nous nous éloignons un peu plus chaque jour du soleil levant et nous ne sommes pas encore arrivés à Katmandou à ce rythme!

Cruel paradoxe, le pays où je me sentais si bien ne veut pas de moi (pour l'instant); alors que chaque arrêt dans un resto, un café, un commerce était un moment de chaleur humaine, d'amitié, de compréhension, alors que je commençais à me sentir non pas chez moi mais comme chez moi, les autorités m'ont demandé de quitter rapidement ce beau pays.

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Il y a une phrase qui dit: " L'important n'est pas l'endroit où l'on va mais le chemin qui y mène". Il faudrait de toute urgence que je fasse mien ce sage principe mais, avant hier, quand, à quelques kilomètres de la frontière irano-turque, quelques militaires m'ont fait faire demi-tour et occasionné 300 kilomètres de détour, j'étais loin d'y adhérer! Ainsi va mon voyage actuellement fait de tours et de détours au point que je chemine tel le poivrot qui quitte le café le soir et erre dans les rues à la recherche de son appartement; au total, cela nous met Tarbes-Ankara à plus 9000 kilomètres! Quand on aime, on ne compte pas!
Avec tous ces détours, il va falloir que j'envisage sérieusement de solliciter une rallonge budgétaire auprès de mes sponsors.
" Tu sais très bien que tu n'en as pas" Ca, c'est Titine qui aime bien intervenir pour me contrarier. Elle a raison en plus. "Comme d'habitude" marmonne-t-elle dans son coin. Mais, vu l'enthousiasme manifesté par mon directeur autour de mon projet, il n'y aura aucun problème pour demander une avance sur salaire en fin de voyage si nécessaire....

Sept jours en Iran, c'est très court mais ça suffit pour que je tombe amoureux de ce pays. Bien sûr, la religion est omniprésente, à la télé, l'autre matin à la mosquée voisine qui faisait profiter tout le quartier de l'office (très) matinal, le soir à Tabriz où, durant trois heures, un homme a chanté ( hurlé parfois) une interminable litanie scandée par le boum boum obsessionnel d'une grosse caisse. A deux reprises, quoique discrètement, deux personnes m'ont laissé entendre que les barbus les gonflaient sérieusement!

Téhéran: une ville folle quand on arrive en moto comme moi et une excellente surprise, les Honda 125 CG pullulent: ma première moto est vraiment universelle. Il y en a des centaines, des milliers ici qui règnent en maître; elles roulent à contre sens, grillent les feux rouges, sont sur les trottoirs avec un, deux ou trois passagers ou des chargements incroyables qui font passer le mien pour une aimable plaisanterie. Elles sont comme une nuée de sauterelles qui s'abattent sur la ville, j'en ai même vues qui servaient de taxis ( bonjour la confiance du passager!).

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Les femmes,les jeunes surtout, contrairement à la campagne, laissent plus volontiers la tenue traditionnelle noire (quelle tristesse cette uniformité) pour des vêtements plus colorés, avec les cheveux légèrement découverts et, dessous on distingue souvent le jean et les chaussures de sport.

Ce fut très dur moralement de remonter mon voyage à contre courant mercredi mais je me dis que, à Ankara, j'ai bon espoir d'avoir un visa de tourisme d'un mois; nous serons alors aux alentours du 22 mars, 30 jours exactement après mon départ, et il me restera 3 mois pour réaliser quelque chose de beau. Mon voyage ne commencera peut être réellement qu'à partir de ce moment.

La route est encore longue jusqu'au 18 juin.... A bientôt.
Christian ( un peu fatigué quand même)

Göreme (Cappadoce), 17/03/02

Note d'information touristique pour celles et ceux qui seraient intéressés. Avec l'étape de demain, la distance Ankara-Téhéran aller-retour est de 2750 X 2= 5500 kilomètres. Si vous souhaitez accomplir ce voyage, préparez vous à admirer des montagnes variées, arides, parfois enneigées, voire très enneigées, à être caressé par un vent glacial, à passer un col à 2700 mètres, à boire des litres de thé ( que vous ne paierez que rarement), à traverser une douane atypique ( ô combien!), à vous faire peur à la vue de milliers de Paykan, à vous demander dans quelle galère vous vous êtes mis le matin et à vous dire " Quel bonheur d'être ici" l'après midi, à passer pour un martien avec sa soucoupe volante demandant une soupe dans un restaurant , à vous imaginer transporté sur une autre planète, à vous croire dans une course de stock-cars au milieu de laquelle on aurait lâché des camions, à vraiment utiliser votre klaxon, à maudire la proximité de la mosquée au moment de l'appel à la prière à 5 heures du matin et, si vous optez comme moi pour un aller-retour (très) rapide, à quelques douleurs musculaires et à des réveils difficiles; et, au final, vous vous poserez la question: " Quand est ce que mon voyage va commencer?" L'Iran, j'en rêve encore et je veux y retourner.

Beaucoup d'Iraniens ont un physique peu marqué au point qu'à plusieurs reprises, on m'a abordé en me prenant pour un gars du pays. Quand je tente de répondre, par contre... J'ai deux scènes en tête qui résument mes sentiments pour ce pays: Jeudi, j'étais à la recherche de la route de la frontière à Khoy et cela faisait une demi-heure que je tournais en rond, déjà démoralisé par mon départ précipité. Soudain, j'aperçois un café. Je rentre, quelques hommes boivent leur thé et l'un deux vient me "prendre en charge"; il m'installe à l'endroit le plus chaud, me regarde boire mon thé et, au moment où je vais me lever, m'en empêche, me montre mes mains marquées par le froid, mon visage fatigué; il va alors me chercher un autre thé avec une galette et une crème enrobée de miel. Il se contente de me regarder manger avec un air très doux. C'est comme s'il avait compris mon désarroi du moment. Au moment de mon départ, notre poignée de mains et nos regards avaient beaucoup de signification . Merci, Monsieur de passage.

Le lendemain, le dernier Iranien rencontré est le pompiste à deux kilomètres de la douane. Il m'invite à rentrer dans son bureau chauffé pour boire le thé, m'offre le petit déjeuner et refusera même que je paye le carburant. Il me fera comprendre qu'il a été très heureux de me recevoir, tout simplement. Relativité des choses: quand j'ai quitté la Grèce pour la Turquie, j'ai eu le sentiment de pénétrer en Orient; il y a deux jours, l'entrée dans ce pays m'a donné l'impression de retrouver l'Europe.

Au fait, petit message à Bruno. Le super klaxon que tu m'avais installé et dont j'étais si fier dans les rues d'Ankara ou de Téhéran a eu une extinction de voix. C'était previsible, un produit français sur une moto japonaise, ça ne pouvait que provoquer un rejet; greffe impossible. Alors, je compte sur toi, tu débarques à Ankara d'un coup de BMW pour assurer le service après vente! ( Jean Paul, fais passer s'il te plait).

Demain, Ankara m'accueille une nouvelle fois; le consulat iranien aussi. Je croise les doigts mais je crois que, ça y est, je démarre vraiment mon périple. Ma tête est enfin prête. Portez vous bien .
A bientôt. Christian

Ankara, 20/03/02

Retour a la case départ. Je suis allé revoir mon "copain" du consulat iranien. J'ai rempli ma demande de visa immédiatement ( ça commencait bien ) et on m'a ensuite dit que mon dossier partait a Téhéran (air connu!) et que j'aurai la réponse mercredi 27.

Question à dix francs: est ce que des fonctionnaires qui ont émis un avis défavorable à un visa double entrée il y a un mois vont donner le feu vert à un visa de tourisme? Je vous donne rendez-vous dans l'émission de la semaine prochaine pour tout connaître de la suite de mon voyage.

J'envisage des voies de sortie et je viens de faire un saut au consulat syrien; pas de problème, le visa est accordé dans la journée mais la présence d'un tampon israélien ....ou d'un visa pakistanais semble beaucoup contrarier les Syriens. Aie!

Finalement, la terre est grande mais elle possède beaucoup de portes entrouvertes ou carrément fermées.

C'est Titine qui est réjouie de ce repos forcé. Hier, elle a eu droit, après ces presque 10000 kilomètres, à un lavage, une vidange, au changement anticipé de ses deux pneus et j'ai installé un klaxon de Tofas, la vieille Fiat 131 encore fabriquée en Turquie. Me voilà donc avec une moto Turquo-japonaise.

Note de l'intéressée " Pas trop tôt qu'il s'occupe un peu de moi. Je n'ai pas droit à ma douche quasi quotidienne, moi; et c'est bien beau de dire que je suis increvable, j'ai aussi besoin que l'on s'attarde un peu sur moi. Cela dit, je reconnais que mon motard me conduit avec beaucoup d'égards même s'il aurait pu éviter de me lancer du jour au lendemain au milieu de la circulation iranienne. Quel choc! J'en ai perdu ma voix!"

Demain, je vais aller poser ma tente dans le petit village de Göreme, si calme sans les touristes à cette époque de l'année et je vais buller, marcher dans cette magnifique région de la Cappadoce en espérant que, dans 7 jours, mon voyage vers le soleil levant reprendra enfin. Sinon..., j'ai une petite idée derrière la tête mais je vais entretenir le suspense.

Qu'elles sont belles et variées les montagnes turques,j'allais dire russes; peut-être parce que l'on croise beaucoup dans ces régions montagneuses les (très) vieilles motos de l'ex Union sovietique auxquelles on a greffé un side-car.

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Ce moyen de locomotion a remplacé l'âne chez beaucoup de paysans. Il sert à transporter la famille, ou bien la récolte de légumes au marché. Elles sont le plus souvent dans un état pitoyable mais continuent, vaille que vaille, à assurer leur travail.

Le contraste est énorme entre ce monde paysan encore très présent et le modernisme de plus en plus développé dans les villes. J'ai souvent l'impression de deux mondes parallèles qui se partagent le territoire.

J'ai retrouvé avec plaisir mes amis à Ankara même s'il était prévu de se revoir bien plus tard, à mon retour de Katmandou. Mais ce n'est peut-être que partie remise. Je ne peux m'empêcher d'être optimiste et de croire à l'obtention de mon visa iranien. J'ai trop aimé ce pays pour ne pas y retourner. Medar m'avait donné un autocollant de son moto-club sur lequel cette phrase était inscrite " L'endroit où tu ne vas pas ne t'appartient pas". L'Iran, j'y suis allé, mais ce fut si rapide que j'ai l'impresssion de quelque chose d'irréel, comme si j'avais rêvé ces 7 jours.

Avant le départ, j'avais annoncé à certains que je pressentais un voyage où il faudrait s'adapter. Je ne croyais pas si bien dire. Mais qu'il est bon, où que l'on aille, de faire le nomade. Christian.

Ankara ,27/03/2002

Madame République Islamique d'Iran et Christian ont la joie de vous annoncer la naissance de leur enfant. Après une grossesse douloureuse et un accouchement difficile, le petit Visa est enfin venu au monde. Le choix du deuxième prénom a été l'objet de vives discussions entre les parents mais, au final, 7 jours paraissant trop réducteur pour un enfant promis à un si bel avenir, c'est 1 mois qui a été retenu.Le bébé se porte bien, mesure environ 7 centimètres pour un poids non connu au moment où je vous écris car il sort de la clinique Consulat d'Iran à 16 heures seulement; le coeur du papa est lui beaucoup plus léger depuis deux heures!

Par contre, mauvaise nouvelle, l'aiguille du thermomètre spécialement acheté pour ce voyage et que j'avais installé sur la moto n'a pas supporté la pression . Il est vrai qu'elle subissait depuis plus d'un mois un stress énorme en flirtant le plus souvent avec des températures négatives. Elle a préféré se jeter de son axe au fond du cadran où elle repose en paix dorénavant....

Cela fait donc une bonne semaine que je "bulle". Ce séjour forcé dans la Cappadoce a eu du bon.

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J'ai pu recharger les batteries, faire de longues marches dans cette superbe région encore désertée par les touristes à cette époque de l'année ( pas étonnant avec ce froid!)et faire de belles rencontres, mes premières avec des voyageurs.

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Jessica et Pascal, deux dynamiques Belges en partance pour l'Iran, le Turkménistan, l'Ouzbékistan ......(excusez moi les Belges, je n'ai pas de carte sous les yeux) et la Mongolie; ensuite Odile et Christian qui terminent doucement leur tour de la méditerranée avec leur adorable Léna qui redonnerait goût à la vie à n'importe quel grand dépressif; Vincent et Stéphane, mes premiers motards (suisses) qui suivent un peu le même itinéraire que moi et que je retrouverai peut-être avec grand plaisir en Iran; enfin Rita et Melkan qui arrivent du Liban. Ce fut l'occasion de longues discussions qui ont été comme une impulsion nouvelle à mon voyage. Nous étions sur la même longueur d'ondes avec nos différences et j'avais le sentiment d'un enrichissement mutuel. Superbe semaine en définitive.
Les deux jeunes qui s'occupent de la pension, Adnan et Erhan ont également été d'une extrême gentillesse, à l'image du peuple turc. Avec eux, il y a eu notamment une soirée "magique"; de ma chambre, je les entendais jouer du saz, un luth a long manche. Je suis venu les écouter; c'était très beau. Et j'ai eu l'idée d'aller chercher mon baladeur et de leur faire écouter Les 4 saisons de Vivaldi. Il fallait voir Adnan, le casque sur les oreilles, les yeux mi-clos en train de mimer, avec ses doigts, les notes de musique; il etait en train de prendre un énorme plaisir à écouter cette musique si loin de sa culture. Un bel échange musical.

Au fait, il neigeait fort sur Ankara hier au soir. L'hiver fait de la résistance en Turquie mais il en faut un peu plus pour me décourager.

Demain, le voyage reprend son cours avec un léger retard. Katmandou me sera peut-être inaccessible avec ce contretemps mais, peu importe, le plaisir du voyage et des rencontres est tellement fort.

Soyez heureux en France ou dans votre voyage.
A bientôt. Christian.

SanliUrfa (sud est de la Turquie), 30/03/02

Aujourd'hui, c'est journée de repos pour moi car le froid, la pluie et la neige ont fini par me pomper pas mal d'énergie sur la route. De toute façon, j'ai mon visa en poche et le temps ne presse pas. Je reprends la route demain et je pense rentrer en Iran lundi si la neige ne se met pas en travers de mon chemin. Le moral est au beau fixe. J'espère que vous allez bien.

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Christian.

Orumiyeh (Iran), 3 avril 2002 11h45

Bye bye la Turquie, (re)bonjour l'Iran.

Ca y est, je les ai franchies, ces hautes montagnes turques, il y a deux jours. La journée s`annonçait plutôt mal; en effet, c'est la neige qui m'a accueilli au petit matin. Rien de tel pour se sentir d'humeur joyeuse quand on a un col à 2300 mètres puis un autre à 2700 mètres à franchir. J'ai donc décidé de passer la frontière plus au nord à Bazargan dans l'espoir d'un temps plus clément. En fait, ma carte étant d'une imprécision rare, je me suis retrouvé 200 kilomètres plus loin à passer un col à 2644 mètres, mais heureusement sans neige sur la route.

A la frontière, il y avait environ 200 camions.... et Titine. Formalités assez rapides avec juste une légère angoisse quand le douanier Iranien me dit " Votre visa n'est pas valable, vous ne pouvez pas rentrer en Iran". En fait, il examinait mon ancien visa. Ouf! Ensuite, une longue route jusqu'à Orumiyeh qui m'a accueilli à la nuit tombée. La douche fut un pur delice après ces 600 kilometres à des températures parfois polaires. Plus tard, à la recherche d'un petit restaurant, j'ai rencontré Vincent et Stéphane, les deux suisses déjà vus a Göreme et SalinUrfa. Nous sommes décidément inséparables; la soirée fut donc plus douce en leur compagnie.

Hier, ils sont partis à Tabriz pour acheter quelques produits pour leurs motos. Je pense que nous allons nous revoir bientôt et ce sera avec plaisir car ils sont très sympathiques et chaleureux.

Il y a deux jours, je quittais la Turquie et son froid hivernal et l'Iran m'accueille avec la pluie! Pas la petite pluie qui ne fait que passer, non, celle qui s'installe durablement. Grrr! En fait, il pleut sans discontinuer depuis hier matin. A tel point que j'ai renoncé aujourd'hui à prendre la route. En outre, hier, c'etait jour ferié ( le 13 ième jour du nouvel an iranien) et Orumiyeh était une véritable ville morte. Sous la pluie, c'était d'une tristesse sans nom. Je rêve de soleil et de chaleur, mes amis suisses aussi d'ailleurs. Ce temps pourri commence à devenir pesant. Patience....

Demain, pluie ou pas pluie, je prends la direction de Sanandaj puis de Hamadan. Je n'ai aucune envie de retrouver l'axe routier Tabriz-Téhéran, ni la capitale surpeuplée. Je vais essayer de trouver des petites routes plus chaleureuses ( avec un peu de soleil s'il vous plait!). Le voyage suit son cours. A bientôt. Christian

Orumiyeh 19H15


Grande nouvelle, il ne pleut plus. De l'influence du climat sur le moral du motard voyageur....
Du coup, la ville me parait bien plus belle et je peux enfin m'y promener sans me tremper les os.
Je suis allé me perdre dans le bazar si typique. Odeurs, couleurs, atmosphère orientale m'ont redonné du punch et mon premier thé iranien m'a été offert dans la partie réservée aux ferailleurs.

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A midi, j'ai mangé un plat iranien que j'avais deja goûté il y a trois semaines lors de mon premier séjour. Dans un petit pot en terre, mijote un ragoût ( pois chiches, pommes de terre, tomates, viande) que l'on vous donne accompagné d'une assiette creuse. On verse dans cette dernière le jus du ragoût et l'on y rajoute des morceaux de pain-crêpe que l'on écrase avec l'aide d'un instrument bizarre ressemblant à une énorme soupape! Etonnant, bon et pas cher ( 1 euro avec le thé). Le nom de ce plat? Abkousht.

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Le change ce matin a été l'occasion de me sentir riche car les plus grosses coupures correspondent à 9 francs français. J'ai un paquet impressionnant de billets dans la poche.
Mauvaise nouvelle: l'essence va augmenter demain. Elle va passer de 40 centimes le litre (je n'ose pas dire le prix en euro) à 45 centimes . Mon budget va en prendre un sacré coup! Pas trop jaloux du côté de la France?
Tous les prix sont bas ici. Je peux me refaire la garde robe ( qui a dit que ce serait nécessaire?) pour trois fois rien et mon ampoule de phare m'a coûté moins d'un euro. Riche, je suis riche. Ca tombe bien, je ne suis pas payé pendant encore un mois.
La Turquie est le pays des métiers de rue mais l'Iran n'est pas mal dans ce domaine. Seulement, il y a moins de choix dans les produits proposés, on est loin de la société de consommation; et la pauvreté semble plus présente.
Voilà mes premières impressions de ce second séjour en Iran. Le moral est en hausse.

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Demain, la route....
A bientôt. Christian.

Sanandaj (Iran), 5 avril 10h30

Tout va bien. Le temps mis a part. J'ai donc décidé de quitter cette zone montagneuse ( et elle est vaste en Iran!) et je me dirige vers des parties plus désertiques et moins en altitude. Aujourd'hui, petite étape jusqu'à Hamadan et demain j'espère arriver à Kashan et y trouver soleil et chaleur ( oui, oui, j'y crois encore!).

Sinon, quel dépaysement! Il va me falloir encore quelques jours pour m'habituer.
A bientôt. Christian.

Kashan (Iran), 7 avril

De l'hiver a l'été sans passer par la case printemps. En quelques heures, le tee-shirt a remplacé la polaire. Je suis aux portes du désert, à 250 kilomètres au sud de Téhéran.

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Le choc climatique a été brutal hier. Sur la route le vert a cédé peu à peu sa place à l'ocre, au marron, au beige. Les 75 derniers kilomètres entre Delajan et Kashan étaient superbes sur une petite route qui serpentait entre de majestueuses montagnes, avec les très hauts sommets enneigés au loin.

Juste avant, Hamadan m'avait accueilli. Je dis accueilli car j'y ai rencontré un jeune Iranien de 27 ans avec lequel j'ai passé une bonne partie de la journée ainsi que la soirée chez lui avec sa famille. Les longues discussions en anglais m'ont permis de prendre conscience de la réalité quotidienne des Iraniens. Une vie difficile mais surtout, mon compagnon d'un jour n'a cessé de me le répéter, une absence de liberté. J'avais devant moi un jeune desoeuvré, désamparé par cette vie dans laquelle il n'a aucun espoir d'amélioration.

Le soir, dans les rues de la ville, il m'a montré deux jeunes adolescentes qui rentraient discrètement dans un appartement. " Elles vont voir leurs amis, mais si elles se font prendre, elles risquent gros dans ce pays"

Chez lui, j'ai fait la connaissance de son frère ainé; huit ans sur le front pendant le conflit avec l'Irak. Il est revenu avec deux doigts sectionnés mais surtout complètement brisé; il s'est d'ailleurs très vite éclipsé après le thé sans assister au repas. J'avais tendance à oublier cette guerre; elle a pris fin il y a seulement un peu plus de 10 ans, a fait 1 million de morts et laissé de nombreuses familles dans la douleur.

Première chute, il y a trois jours, à l'arrêt. Je m'arrête près d'une Paykan ( j'aurais du me méfier!), le conducteur m'indique gentiment ma route, sort de sa voiture et, au moment où je veux démarrer, ouvre violemment sa porte qui s'écrase sur la moto et me déséquilibre! Imprévisibles Iraniens dès qu'ils sont a bord de leur véhicule! Résultat: une sacoche bien fendue. Je viens de la réparer; si la colle iranienne n'est pas fabriquée dans les mêmes usines que les voitures , j'ai peut-être une chance que la réparation tienne....

Il faut vraiment que je me méfie des Paykan; l'une d'elles m'a carrément poussé au carrefour trouvant sans doute que je roulais trop doucement.

Je suis monté dans cette voiture à Hamadan avec mon compagnon et ses copains; à l'avant, trois personnes sont montées à côté du chauffeur de taxi, deux à sa droite et une à sa gauche! Ca ne semblait pas le déranger outre mesure pour conduire.

Beaucoup de femmes sont vêtues de noir à Kashan et, plus surprenant , de jeunes adolescentes. J'ai du mal à me faire a cette rigueur vestimentaire.

Je n'ai pas encore mes points de repère ici; les restaurants et les cafés se cachent; mais, quand j'en trouve un comme à Hamadan, ils me réservent de bonnes surprises parfois. Là , au petit matin , le café était désert et pendant que je buvais mon thé avec la traditionnelle crêpe (lavash) , le patron a trouvé naturel de me servir une partie de son repas qu'il préparait ( riz parfumé); pas d'échange verbal mais un beau moment de partage).

A bientôt. Christian

Kashan, 7 avril 18h30

Tout va bien sauf internet qui me fait des misères.
A plus tard, sûrement d'Ispahan.
J'espère alors pouvoir envoyer un message plus long Christian

Ispahan, 11 avril

Il fait bon vivre à Ispahan, alors je prolonge mon séjour, flânant dans les rues, longeant le fleuve le soir, me perdant dans le grand bazar, me reposant dans les maisons de thé tout en admirant les magnifiques mosquées de la ville.

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Et, le soir, je passe des heures à discuter avec les voyageurs qui se sont donnés rendez-vous dans le petit hôtel où j'ai élu domicile.

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J'ai ainsi pu obtenir pas mal d'informations sur la traversée du Pakistan en discutant avec Christophe et Jens, deux motards allemands qui arrivent d'Inde. La vie s'écoule paisiblement.

Nouveau départ prévu demain ( à moins que ce ne soit après demain....) pour Yazd, puis Shiraz, Kermann et Bam. A bientôt. Christian.

Yazd (Iran), 17 avril

J'ai fini par trouver cette chaleur tant espérée, dans cette ville aux portes du désert.

J'ai d'abord passé huit merveilleuses journées à Ispahan au cours desquelles j'ai alterné les (très) longues discussions avec les voyageurs du monde entier qui se posaient quelques jours dans ce petit hôtel, les marches le long des ponts de la ville, les heures passées dans les très agréables maisons à thé.

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J'ai eu du mal à m'arracher de cette ville au point que j'en ai oublié ma destination première, Katmandou, de plus en plus improbable au fur et à mesure que les jours passent. Peu importe, je vis au jour le jour des moments extraordinaires, d'une intensité peu commune et c'est ce qui compte.

J'ai fini par retrouver mes deux compagnons suisses en Africa Twin et nous avons convenu de nous retrouver à Shiraz pour entamer ensemble la traversée du Pakistan. J'ai pu avoir des renseignements frais sur le pays et, bien sûr, les informations données par les medias ne se retrouvent pas, mais pas du tout , dans les témoignages de ceux qui ont traversé le pays. J'ai hâte d'entamer ce nouveau voyage à trois.

55ieme jour de voyage aujourd'hui, 14000 kilomètres parcourus et un sentiment de plus en plus fort de liberté. La vie est belle

A bientôt. Christian.

Shiraz (Iran), 18 avril 19h

Demain, mes amis suisses me rejoignent à Shiraz avec leur Africa Twin et nous filons alors plein est vers le Pakistan.

Christian.

Quetta (Pakistan) 27 avril 15h30

Ca y est, un nouveau pays à decouvrir s'offre à moi. Hier, avec Stéphane et Vincent, mes deux sympathiques compagnons de route, nous avons traversé le désert du Balouchistan. 650 kilomètres sportifs avec de la chaleur, du sable sur la route parfois, des trous, des bosses, des camions "prioritaires" qui vous demandent "gentiment" de vous mettre sur le bas côté, des chameaux, des tentes de nomades, des montagnes, des villages perdus, des hommes enturbannés. Les moteurs ont eu chaud, les pilotes aussi; les motos ont encaissé de sacrés chocs mais nous n'avons rien perdu en route, semble-t-il!

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L'arrivée à Quetta est impressionnante, avec les innombrables rickchaws, ces tricycles qui servent de taxis ici et qui arpentent les rues de la ville dans un panache de fumée incroyable; il y a aussi cette impression d'une vie d'un autre âge, une atmosphère pleine de couleurs, de bruit; ça vit et on en prend plein la figure après deux journées sur des routes désertes. En tout cas, j'aime! En même temps, on retrouve dans l'hôtel un service très anglais teinté d'une douce nonchalance asiatique. Le Pakistan est en train de me séduire.

Avant, il y eut les derniers jours passés en Iran, à Bam où se trouve une magnifique citadelle en terre au milieu du désert.

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C'est avec Petra le site qui m'a le plus ébloui et quel plaisir de pouvoir le visiter dans le silence du petit matin sans un touriste à l'horizon.
Dans la guest house de Bam, nous avons rencontré des voyageurs qui arrivaient du Pakistan et qui gardaient un excellent souvenir de ce pays; rien à voir avec les informations ( désinformations serait un terme plus juste) des médias occidentaux.

Compte tenu du retard pris, j'envisage donc, si ma première impression favorable se confirme, de rester dans ce beau pays. Les quatre personnes rencontrées en Iran m'ont toutes parlé du nord du pays, via la Karakoram Highway, comme d'une région extraordinaire avec une population très accueillante. La route s'élève peu a peu jusqu'à atteindre 4700 mètres d'altitude en arrivant à la frontière chinoise. Je prendrai ma décision à Islamabad où je vais demander mon visa de transit pour l'Iran, mais l'envie est très forte de me diriger vers cette région qui semble avoir fait rêver ceux qui l'ont parcourue.
Seul problème, Daniel, tu devras alors changer le titre de mon site; exit Katmandou, bonjour Karakoram Highway, ça sonne bien, non?.

Il règne une douce pagaille à Quetta et la pauvreté semble bien présente; les boulangeries sont d'une rusticité rare, la saleté est bien là, la pollution aussi mais il y a comme une étincelle de vie que je n'ai pas rencontrée en Iran et qui me séduit. J'ai vraiment envie de m'attarder dans ce pays.

Je suis maintenant bien encadré par mes deux compagnons suisses, Stéphane et Vincent. L'un a tout de suite pris en charge mon argent que j'ai déposé dans le coffre fort installé à l'intérieur de la sacoche de sa moto et le deuxième veille à ce que je nettoie correctement ma moto le matin avant de prendre la route ( je plaisante, je plaisante!). Plus sérieusement, je suis très heureux de faire ce petit bout de route avec eux; j'ai l'impression de faire un autre voyage et ils ont beaucoup de chaleur humaine en eux;
j'ai de la chance de les avoir rencontrés.

Ici Quetta, à vous la France.

Ce voyage est vraiment EXTRAORDINAIRE.

A bientôt.

Quetta ( Pakistan) suite 28 avril 2002

Kafka n'est pas mort. Il habite à Quetta. Hier, le premier cabinet d'assurances a établi un contrat pour nos motos qui n'avait d'autre utilité que de nous mettre en règle avec les forces de police. Quand nous abordions le sujet des réparations du tiers en cas d'accident, la réponse "no problem" nous laissaient dubitatifs. Au final, notre interlocuteur a reconnu que le document qu'il nous préparait ne servirait à rien dans un tel cas, mais il nous demandait malgré tout de lui donner ses roupies! Un assureur qui n'assure pas, il en existe (au moins ) un au Pakistan! En fait, trois heures, deux rafraichissements et un thé auront suffit pour enfin trouver un contrat ( à priori) convenable....
Pour fêter ça, soirée cinéma hier. Tom Raider en Urdu ( langue du pays) dans une salle de Quetta, c'est quelque chose à vivre! Un souvenir inoubliable pour la modique somme d'un demi-euro.
Le taux de pollution est impressionnant ici. Pas besoin d'appareil de mesure pour s'en rendre compte, on inspire un grand coup et ça suffit!
Marcher dans les rues de Quetta, c'est faire un saut dans le temps. Si on fait abstraction des véhicules à moteur, on pourrait se croire revenus quelques siècles en arrière quand on passe devant les multiples boutiques de la ville et que l'on regarde la vie s'écouler autour de soi. Je n'ai pas encore digéré mon arrivée au Pakistan, mais je commence à mieux comprendre ce qu'ont voulu exprimer Christoph et Jens, les deux motards allemands rencontrés à Ispahan, lorsqu'ils m'ont dit avoir eu l'impression de retrouver l'Europe en rentrant en Iran.
Dans les rues poussiéreuses de la ville, à chaque instant, le regard se pose sur un mendiant. Souvent, l'homme est par terre, dans la saleté, infirme, et je me sens mal à l'aise. Je détourne souvent la tête et je pense à cette guerre pas si lointaine en Afghanistan qui a détruit le corps et l'esprit de milliers de personnes. On rencontre aussi de jeunes garcons, Afghans eux aussi, qui vendent quelques bonbons pour survivre. C'est aussi ça la réalité de ce pays. A Ispahan, un de ces jeunes m'avait accompagné alors que je flanais dans les rues de la ville; il m'avait raconté son exil en Iran. Il faisait son maximum pour apprendre l'anglais car il avait la certitude que ça l'aiderait à s'en sortir plus tard; il avait évoqué avec moi son prochain retour en terre Afghane. Que de vies détruites dans cette région du monde.
J'ai oublié de vous parler de cette superbe étape du 21 avril entre Sirjan et Djiroff ( pas de problème pour situer, je suppose?). Ce fut ma plus belle journée de route. Nous nous sommes rapidement élevés jusqu'à frôler les 3000 mètres; la route serpentait à n'en plus finir. Les sommets les plus hauts suivaient notre progression dans ce paysage superbe où l'ocre des montagnes contrastaient admirablement avec le très beau vert des prairies. Le revêtement de rêve permettaient toutes les fantaisies au point que j'imaginais très bien les copains sur leurs motos sportives venir se faire plaisir dans ce paradis motard. Pendant des heures, nous avons roulé avec du bonheur plein la tête.
Demain, nouveau départ pour nous diriger vers Islamabad que nous pensons atteindre dans 3-4 jours. Là, pendant que Stéphane et Vincent demanderont une extension de leur visa, je solliciterai mon visa de transit pour l'Iran car il faudra bien songer un jour ou l'autre à faire demi tour. Pour l'instant, je vis au jour le jour un magnifique voyage et, dans 3-4 semaines, j'évoquerai la question du retour.
A bientôt. Soyez heureux.
Christian.

Rawalpindi (Pakistan), 2 mai 2002

Sept jours se sont écoulés depuis notre entrée au Pakistan et je crois que je n'ai pas encore digéré ce pays. Il est difficile d'établir des comparaisons, mais jamais au cours de mes vingt années de voyage je n'avais connu un tel dépaysement.
Après nous être reposés à Quetta, nous avons fini la traversée du Balouchistan. La route était déserte .... et défoncée. Elle a fait son maximum pour nous épuiser, mais le trio franco-suisse a brillamment résisté. Seul le porte-bagages de Vincent a eu soudain un petit coup de fatigue. Cela nous a valu une belle leçon de soudure "rustico-pakistanaise" sous le regard intéressé d'une bonne trentaine de personnes. Car, ici, il est impossible de passer incognito avec nos motos. Dans la petite ville de Loralaï, alors que nous buvions devant un "café", cinquante personnes nous observaient, sans mot dire; il n'est pas toujours facile de rester zen dans de telles circonstances car le moindre de nos gestes est minutieusement étudié.

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Après les plateaux désertiques du Balouchistan, c'est la verdure qui nous a accueillis lorsque nous nous sommes rapprochés de la plaine de l'Indus. J'ai eu l'impression que nous rentrions en Inde, ce qui est somme toute normal car les deux pays n'ont été séparés qu'en 1947. Sur la route, nous avons eu droit à un spectacle permanent: Imaginez une route étroite sur laquelle se mélangent dans une pagaille indescriptible animaux, oiseaux, piétons, cyclistes, charrettes ( beaucoup de charrettes!), petites motos, rickchaws, bus et camions. La règle première est de faire n'importe quoi à tout moment. Vous mettez trois motards européens au milieu, ça vaut largement le grand huit de la foire du trône à Paris au niveau des sensations! Le premier jour, on se demande ce qui nous arrive, et , ensuite, on fait comme tout le monde, on s'adapte ... et on klaxonne beaucoup. Alors, bien sûr, on fatigue pas mal d'autant que la chaleur s'est bien installée depuis quelques jours; les arrêts Sprite, Coca Cola, Fanta, eau minérale se multiplient; on va finir par plus consommer que nos motos!

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Pendant que la moto taille la route, j'ouvre grand les yeux devant ce spectacle; tiens, un cycliste qui porte sa chèvre sur le porte-bagages, plus loin, c'est un Toyota pick-up avec deux vaches (!) à l'arrière et huit personnes sur le toit ( pour rééquilibrer le poids je suppose!); tiens un camion en panne qui a perdu toute sa transmission arrière sur la route; un homme qui se promène avec son singe en laisse; intéressant, un homme roule sur sa petite 125 avec 5 enfants ( record battu); les oreilles aussi sont sollicitées car le silence semble une denrée extrêmement rare ici; chaque véhicule, quel qu'il soit, se doit de posséder un ou plutôt plusieurs klaxons et il semble rigoureusement interdit de ne pas l'utiliser. Résultat, l'entrée dans les villages se fait dans une cacophonie impressionnante et je ne suis pas mécontent de mon klaxon installé en Turquie pour me faire entendre.

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Aujourd'hui, nous nous reposons dans la banlieue d'Islamabad et nous avons entamé les formalités d'extension de visa pour mes deux amis suisses et de demande de visa iranien de transit pour moi; match nul, nous sommes rentrés bredouilles mais il y a bon espoir que samedi tout sera réglé. Patience, patience!
Dans ce cas, nous entamerons la montée de la Karakoram Highway qui devrait nous amener jusqu'à la frontière chinoise. Puis nos routes se sépareront, Stéphane ete Vincent rentreront en Inde et j'amorcerai mon chemin de retour.
A bientôt

Rawalpindi, 3 mai 2002 , 18 heures.

Le trio Franco-suisse "Les Diarrhéetiques Boys" font depuis 24 heures une superbe représentation avec , dans le rôle principal, Vincent, champion toutes catégories du nombre d'aller-retours chambre-wc. En définitive, ces contretemps administratifs tombent à pic pour que les voyageurs reprennent quelques forces avant les prochaines étapes.
Vincent et Stéphane ont obtenu aujourd'hui leur extension de visa et ont ensuite donné une leçon d'économie à la banquière d'American Express en lui expliquant que la Suisse n'était pas dans la zone euro et qu'ils pouvaient aisément changer leurs travellers chèques en francs suisses. Comme souvent au Pakistan, le problème a été résolu lentement, très lentement, mais dans la plus grande courtoisie; le thé offert nous a aidés à patienter.
J'ignore si l'on trouve beaucoup de salles d'exposition de peinture au Pakistan, mais l'art populaire s'exprime au quotidien dans la rue. Les camions sont superbement décorés et donnent une touche de gaieté a la route.

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Ce goût de la décoration se retrouve dans les taxis, les tracteurs(!), les bus et même les plus jeunes commencent à s'entraîner sur leurs vélos. Le gros avantage est qu'on les voit venir de loin, et comme ils conduisent très mal, ce n'est pas superflu! Vu le nombre de véhicules arrêtés sur le bord de la route, je les soupçonne même de donner la priorité à la décoration plutôt qu'à l'entretien mécanique. Ah, si, un accessoire indispensable fait l'objet de toutes les attentions: le klaxon. On en entend de toutes sortes; certains sifflent, d'autres rappellent étrangement les cornes de brume des bateaux; c'est une véritable cacophonie qui envahit les routes au point que je finis par trouver les Egyptiens très calmes dans ce domaine!
Demain, je croise les doigts, je devrais obtenir mon visa de transit. Je suis devenu très méfiant lorsque je pénétre dans un consulat....
Dimanche devrait alors marquer notre départ pour les hauteurs du nord du Pakistan.
A bientôt.

Rawalpindi, 4 mai 2002

Je déteste les consulats, surtout iraniens, qui prennent un malin plaisir à me contrarier régulièrement depuis le début de mon voyage. Ici, à Islamabad, après avoir rempli en deux exemplaires quatre pages d'informations essentielles pour la sécurité du pays, on m'a annoncé que je devais attendre la réponse qui arrivera dans une semaine après un petit crochet de mon dossier à Téhéran. Tout ça pour un simple visa de transit de 7 jours. Grrr! Jai envie de mordre!
Peut-être vais je me décider à faire le tour de l'Europe lors de mon prochain voyage....
En attendant qu'un fonctionnaire décide ou non d'apposer un beau tampon sur mon passeport, nous allons quitter cette ville surchauffée vers un climat à priori plus agréable sur la Karakoram Highway demain.
Christian ( un brin énervé)

Gilgit (Pakistan) 7 mai 2002



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Trois jours que nous avons commencé à parcourir cette montagne qui parait sans fin. Nous nous sentons infiniment petits devant elle; il y a quelques heures, nous avons frôlé le Nanga Parbat qui culmine à 8126 metres, mais le temps couvert ne nous a pas permis de le voir.
Nous ne sommes plus qu'à 250 kilomètres de la frontière chinoise et le coeur bat très fort quand nous roulons au milieu de cette nature grandiose. La moyenne horaire est faible car les virages se succèdent et la vue de profonds précipices n'incite guère a l'attaque; en outre les pilotes sont très occupés à eviter les nombreuses pierres qui parsèment le parcours. Peu importe les difficultés, quelle beauté s'offre à nous!

Gilgit (Pakistan) 9 mai 2002 18h15

Ce matin, quand le militaire a soulevé la barrière à la sortie de Sust, j'étais très ému. Nous quittions le dernier village pakistanais et nous nous dirigions vers la frontière chinoise, là haut, à 4700 mètres d'altitude.
Mais, à 50 kilomètres du but, à 3200 mètres d'altitude, une avalanche s'est mise en travers de notre chemin.
L'homme, dans toute sa folie, a cru dompter cette montagne en construisant cette route incroyable, mais la nature est là pour lui apprendre l'humilité. C'est d'ailleurs ce que je ressens depuis plusieurs jours, un sentiment très fort de fragilité face à la puissance de ces montagnes dont certaines culminent à plus de 8000 mètres.

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J'ai l'impression qu'à tout moment, cet équilibre entre le ruban de goudron et la masse rocheuse peut basculer. Et je crois que le bonheur de parcourir cette extraordinaire region s'en trouve encore grandi.
Avant cette journée inachevée, nous avions, la veille, effectué la plus belle étape depuis le début de mon voyage. Nous sommes rentrés dans une autre dimension avec ces pics qui nous obligeaient à lever très haut la tête alors que nous étions déjà à 2000 mètres d'altitude. J'en avais le souffle coupé, je n'ai pas de mots pour décrire l'émotion qui s'est emparé de moi.
Demain, j'entame le chemin du retour, mais je ne suis pas encore arrivé en France, j'ai en gros 12000 petits kilomètres qui m'attendent de pied ferme! Et je ne sais toujours pas si mon visa iranien me sera accordé quand je serai à Islamabad dans quelques jours; les autorités iraniennes sont tellement imprévisibles. Mais je garde le moral.
Je vous l'ai peut être déjà dit, mais je crois qu'il est bon d'insister: le Pakistan est un magnifique pays et ses habitants sont courtois, gentils, prévenants, généreux, pacifiques, à mille lieux de ce qu'on nous rabâche sur les ondes. Depuis mon entrée dans ce pays, je suis sous la charme et les Pakistanais nous offrent chaque jour des petits moments de bonheur. Merci!

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77 ième jour de voyage, 18000 kilomètres au compteur et le plaisir est toujours là. Dans ma tête , cela fait un an que j'ai quitté la France. Si ce n'est pas de la rentabilité, ça, je n'y connais rien!
A bientôt.
Christian

Rawalpindi, 13 mai 2002



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J'ai quitté la zone montagneuse et sa douce fraîcheur et je baigne maintenant et pour un moment encore dans la fournaise pakistanaise. Qu'il est loin le début du voyage avec les poignées chauffantes branchées en permanence et les repas, transi, près du poêle des lokantas turques.
Elles sont hautes, très hautes, ces montagnes pakistanaises, douze dépassent les 7500 mètres et six sont au delà des 8000 mètres mais, ce qui m'a frappé, c'est leur longueur. Imaginez que, peu après Islamabad, on commence à grimper pour se retrouver 800 kilomètres plus loin près de la frontière chinoise. Au début, on pourrait se croire sur les hauteurs de Nice avec une végétation très méditerranéenne, puis c'est la verdure qui s'impose avec de magnifiques cultures en terrasse, une douceur de vivre;

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la traversée du Kohistan marque la fin de ces paysages bucoliques, le rocher règne en maître avec ses falaises menaçantes et sa route véritablement "cassée"; puis, après Chilas, le paysage devient plus aéré, moins oppressant avec de grandes vallées et c'est à ce moment là que survient le choc à la vue de ces pics vertigineux . Une grande humilité s'installe en soi face à la puissance de cette masse rocheuse. D'ailleurs, lors de mon retour, je suis arrivé sur les lieux d'un éboulement qui venait juste de se produire; quelques dizaines de blocs rocheux avaient dévalé sur la route empêchant le passage des véhicules....à quatre roues. Vive la moto!
Ce matin, je me suis rendu un peu tendu au consulat iranien où, après m'avoir fait poireauter une bonne demi-heure, on m'a demandé de repasser après-demain. Rien n'y fit pour tenter de les faire changer d'avis. Le planton semblait sensible à mes arguments mais le décisionnaire au bout du téléphone, bien caché derrière son inaccessible bureau a été inflexible. Heureusement que les Iraniens ne ressemblent pas à ceux qui représentent le pays, il y aurait du souci à se faire!
Deux jours à tuer le temps dans une ville où il n'y a pas grand chose à faire et où la chaleur vous limite dans vos initiatives tant elle vous assomme; même la nuit n'apporte pas de répit.
Justement, parlons d'Islamabad. Une ville étonnante qui ne ressemble à aucune autre. Elle est quadrillée de larges avenues bordées d'arbres, de bois, de verdure; on cherche en vain le centre ville. Il y règne un certain calme mais que cette ville est triste, sans vie, avec ses blocs d'immeubles et ses commerces modernes. Le Pakistan est bien loin ici.
Hier, alors que je me rafraîchissais dans un village à l'ombre d'un arbre , j'ai assisté a un scène surprenante. Une Petite Suzuki pick-up ( très populaire ici) sort à pleine vitesse d'un virage, le conducteur saute sur les freins pour éviter le camion arrivant en face, la voiture part en embardée, est déséquilibrée sur une bosse, se couche sur le flanc et termine sa course folle contre un poteau électrique. Que croyez vous qu'il arriva? En une minute, les personnes présentes sur les lieux redressèrent le véhicule.... et le conducteur et son passager reprirent immédiatement la route sans même se donner la peine de verifier l'étendue des dégâts sur la voiture! Incroyable! Remarquez, cela aurait pu être bien plus grave car, en général, de nombreux passagers sont transportés; j'en ai compté jusqu'à 18 dans ce type de véhicule de 3,20 mètres de long, ce qui n'a rien d'étonnant quand la plupart des minibus Toyota Hiace en contiennent jusqu'à 25!

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Quelques heures après, j'ai aperçu des nomades qui marchaient en famille avec leurs ânes et leurs chevaux transportant tous leurs biens; où allaient-ils, de quoi vivent-ils? C'est ce qui me surprend le plus ici, l'existence de modes de vie qui semblent ne pas avoir changé depuis des siècles et, parallèlement, une vie moderne et trépidante. Peut-être est-ce ça, l'équilibre d'un pays?
A bientot
Christian

Quetta 18 mai 18 heures

En vue de diversifier mon carnet de route et surtout d'augmenter le nombre de ses lecteurs et ainsi séduire les annonceurs publicitaires, j'ai décidé de créer une rubrique culinaire.
Premier numéro: la recette du Touristransitvisa à l'Iranienne.
Note de la rédaction: cette recette nécessite une très longue préparation et n'est destinée qu'à un public averti.
Ingrédients:
- Un motardo-voyageur ayant bourlingué en liberté pendant 80 jours environ
- Un passeport
- un tampon
- un stylo
- beaucoup de mauvaise volonté
- une savante utilisation du pouvoir de décider
Vous prenez votre motard, tout frais, et vous le faites doucement mijoter 9 jours.
Après ces 9 jours, vous l'examinez pour le principe et vous rajoutez deux jours de plus ( c'est ce qui va lui donner son goût et sa consistance).
Le 11 ième jour, vous lui demandez 1800 roupies et vous le laissez "lever" en lui demandant de s'asseoir(!) sans l'informer du temps d'attente ( très important, ne jamais informer de ce qui va arriver).
Quatre heures après, vous l'appelez au guichet en lui disant qu'il doit revenir dans trois heures.
Ceci va provoquer une réaction de dépit qui va le rendre plus croustillant encore.
Trois heures plus tard, vous le laissez s'asseoir et vous peaufinez la préparation pendant une demi-heure alors que le consulat se vide pour le week-end à venir.
Quand enfin vous quittez votre bureau, vous lui remettez négligemment son passeport muni de son visa en évitant de sourire et en oubliant ( c'est la petite touche finale qui magnifiera votre recette) de lui souhaiter un bon séjour dans votre pays.
C'est prêt. Bon appétit!


J'ai oublié de vous en parler mais, au Pakistan, on roule à gauche....en théorie.
En fait, la réalité est un peu plus complexe. On roule en quinconce, en vrac, sens dessus-dessous et une grande majorité a choisi la voie du milieu, surtout sur les routes étroites, pour "égayer" la vie de celui qui arrive en face.
Je crois savoir qu'en France, par contre, on est très respectueux du code de la route en ce moment et que l'on tient très bien sa droite!
Je me suis adapté à cette conduite très particulière ( on ne m'a pas vraiment laissé le choix!) mais je dois reconnaitre que c'est nerveusement très éprouvant, surtout par 40 degrés à l'ombre et que l'on roule sous le soleil.
Il y a deux jours, alors que je terminais mon étape au milieu de la circulation, c'est à dire un savant mélange de piétons suicidaires, de rickchaws fumant et pétaradant, de deux roues arrivant de tous les côtés, de buffles placides ( mais encombrants!), de minibus toujours pressés, de camions à l'allure d'escargot et de charrettes encore moins rapides, un superbe bus flambant neuf (rarissime ici) m'a rattrappé tous klaxons hurlant sur une route étroite. Je me suis dit: " Toi, mon coco, tu vas attendre que l'on arrive en ville dans 10 kilomètres". Et bien, pas du tout, le coco en question a décidé de me doubler au moment où je m'apprétais à dépasser un rickchaw lui même sur le point d'avaler une charrette. J'ai "prudemment" plongé dans le bas côté ( manoeuvre presque routinière ici), la charrette s'est serrée un peu plus, le rickchaw a fait ce qu'il a pu et le mastodonte, dans un hurlement de klaxons saccadés s'en est allé.
A partir de là, à distance respectable ( je tiens à ma santé!), j'ai suivi l'engin qui m'a offert un véritable festival de haute voltige. C'était prodigieux de dextérité et effrayant à la fois.
Combien de fois a-t-il mordu sur le bas côté pour en sortir en dérapage et contrebraquage ( manoeuvre plutot inusitée sur un bus!), combien de fois a-t-il foncé, tête baissée sur les véhicules et les piétons qui, comme par enchantement se poussaient in extremis à chaque fois. J'imaginais la tête des passagers a l'intérieur avec le repas remontant à la surface. J'avais l'impression d'assister à la scène d'un film d'action américain mais, là, c'est la réalité que j'avais sous les yeux et rien n'avait été préparé à l'avance. Seul Allah supervisait cette séquence et, ma foi, il ne s'en est pas trop mal sorti aujourd'hui!
Cet exemple est le pire auquel j'ai assisté mais il faut avoir les nerfs bien accrochés et les réflexes rapides pour conduire dans ce pays. Je ne suis pas trop mécontent d'en avoir fini avec cette caractéristique car ma prochaine étape, c'est le désert du Balouchistan, 650 kilomètres où il faudra surtout éviter les trous sur la route et les dunes de sable. Ensuite, l'Iran.... et son calme.
Je voudrais d'ailleurs m'excuser auprès des conducteurs iraniens que j'ai injustement critiqués; comparés à leurs voisins, ce sont des as de la route , d'une extrême prudence. Il fallait que ce soit dit.
Je crois que je vais m'octroyer une journée de repos dans cette agréable et tempérée ville de Quetta ( cela me change des 45 degrés de Jacobabad hier). Titine ayant été repeinte couleur sable ce matin, elle va avoir droit à une petite vérification avant la suite du voyage.
La tempête de sable qui s'est abattue sur nous a été la plus forte que j'ai jamais connue. Soudain, je me suis retrouvé face à un mur de sable et je n'y voyais pas à un mètre. Obligé de m'arrêter. Terrible! Heureusement, cela n'a duré qu'une dizaine de kilomètres car je me sentais très, très petit à ce moment là.
Le moral est au beau fixe.
Bisous. Christian.

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19/05 Dimanche, jour de repos à Quetta

La présence de la femme est très discrète au Pakistan. Nous sommes dans un pays musulman et cela se voit. Mais, contrairement au pays voisin, l'Iran, je n'ai pas l'impression de principes religieux strictement imposés par les gens à la tête de l'Etat.
Non, je crois plus au poids des traditions,à la pression familiale, au fait aussi que l'on est dans une société très rurale où les mentalités évoluent lentement.
En tout cas, ce ne sont que des impressions fugitives d'un voyageur ne faisant que passer et je n'ai pas vraiment eu le loisir de questionner les intéressées sur ce qu'elles pensaient de leurs conditions de vie de femme!
Mais ce qui m'a frappé, c'est la tristesse que j'ai pu lire sur leur visage, comme une sorte de résignation. Il faut reconnaitre que la vie rurale semble difficile et qu'elles travaillent beaucoup dans les champs.

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J'ai eu du mal à saisir des moments de rire, de complicité, même entre elles. Peut-être est-ce simplement une façon d'être, plus intérieure, mais je n'ai pas ressenti une grande joie de vivre chez la femme pakistanaise.
J'ai appris que le discours officiel de création du Pakistan en 1947 disait: " Vous êtes libres d'aller dans vos temples ou vos mosquées ou tout autre lieu religieux; vous avez le droit d'appartenir à la religion de votre choix".
Paroles sages mais qu'en est-il dans la réalité?. Les discussions que j'ai pu avoir avec certains Pakistanais m'ont montré une grande ouverture d'esprit,la croyance religieuse étant pour eux quelque chose de très personnel qu'il fallait respecter.
Le contraste entre ces femmes voilées, qui évitent souvent le regard de l'homme étranger et les programmes des télévisions occidentales regardés et montrés dans les hôtels est étonnant; également, le corps de la femme plus que dénudé par rapport aux critères musulmans apparait souvent sur des affiches publicitaires, dans les magasins.

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Le climat tempéré de Quetta m'a fait de l'oeil pour que je reste un peu. Il n'a pas fallu me pousser beaucoup d'autant que j'ai fait la connaissance de deux motardes belges, Truy et Iris, arrivées la veille d'Iran au guidon de deux Suzuki 650. La discussion s'est rapidement orientée vers nos impressions de voyage, des échanges d'informations, et plus généralement sur une philosophie de vie assez similaire. J'aime beaucoup ces rencontres qui se créent spontanément car nous marchons dans la même direction ,ou tout au moins avec le même état d'esprit. Il y a une compréhension mutuelle immédiate et des échanges d'une grande richesse.
A bientôt.
Christian.

Email du 22 mai 2002

Bonsoir Daniel, Je t'écris de Yazd ( en Iran) où je suis arrivé après trois jours de route intensifs.
Demain, je me dirige vers Ispahan où je compte me reposer deux nuits pour récupérer un peu.
Tout va bien.
Je vous embrasse.
Christian.

Ispahan, 23 mai 2002

Je viens de m'enquiller un marathon de quatre jours et je suis à peine essoufflé! L'entraînement sans doute.
20/05 Traversée du désert du Balouchistan. 650 kilometres en 11 heures sous une forte chaleur mais tellement concentré sur mon sujet que j'ai trouvé l'étape (presque) facile.

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21/05 Passage de la frontière Pakistano-Iranienne en deux heures chrono avec, c'est une habitude, un desintérêt total des douaniers pour mes bagages. Il va falloir que j'envisage sérieusement de transporter de la drogue dans mes sacoches pour financer mes futurs voyages!
Puis une longue route surchauffée jusqu'à Bam où, malgré une vitesse de 100 km/h, le ventilateur de ma moto n'a cessé de fonctionner. Arrivée a l'Akbar Tourist Guest House de Bam ( une adresse à retenir, une des meilleures de tout mon voyage) où je retrouve Akbar et sa profonde gentillesse et des voyageurs de tous horizons; les discussions se prolongent tard dans la soirée.
22/05 Bam-Yazd: 550 kilomètres à l'énergie et une très belle rencontre avec Sylvain, un Suisse; nous avons partagé nos impressions sur le voyage en particulier et la vie en général; très enrichissant
Aujourd'hui , petite étape de 300 kilomètres jusqu'à Ispahan où je vais m'accorder une journée de repos.
En fait, 7 jours pour traverser l'Iran, c'est très court. Heureusement que j'ai une moto exceptionnelle qui survole les obstacles mais ça, vous vous en étiez déjà rendu compte!
J'ai retrouvé avec plaisir l'Iran même si j'ai une pensée toute particuliere pour le Pakistan et surtout ses habitants extrêmement attachants.
Le contraste entre les deux pays est saisissant. J'ai retrouvé ici une "pauvreté" de vie. Je ne veux pas dire par là que les Iraniens sont moins riches que leurs voisins. C'est comme si des décennies de totalitarisme, d'absence de liberté, de guerre avaient anesthésié ce peuple. J'ai parfois le sentiment que les Iraniens ont fini par baisser les bras, découragés par cette vie plombée par un pouvoir religieux autoritaire. Je n'y trouve pas cette étincelle de vie que l'on perçoit au quotidien au Pakistan.
Il y a comme une sorte de " à quoi bon" alors que le sentiment profond que rien ne va changer dans le pays est omniprésent.
Tous les jeunes avec lesquels j'ai parlé répètent la même chose: "Il n'y a pas de futur chez nous". Je réalise l'énorme chance que j'ai d'être né dans un pays de liberté d'expression, d'aller et venir, dans lequel j'ai suffisamment d'argent pour vivre bien.
Ce doit être une impression terrible de vivre ainsi en ayant perdu toutes ses illusions. J'espère que, malgré tout, cette nombreuse jeunesse arrivera peu à peu à faire bouger les choses et que ce pays aura la chance de s'ouvrir à l'extérieur.
J'ai atteint hier mes 3 mois de voyage et j'aurais aimé les fêter avec une énorme glace menthe-chocolat car il fait très chaud ici!
A bientôt.
Christian.

Ispahan, 24 mai 2002

Hier, j'ai fait la rencontre de deux jeunes français qui ont décidé de rentrer au pays au guidon de deux 125 Minsk (motos fabriquées en Biélorussie) après leurs deux ans de coopération au Vietnam . Pour les non initiés, c'est, dans la production motocycliste, ce qui peut se faire de pire au niveau qualité de fabrication, fiabilité et robustesse. Pour vous situer, c'est un peu comme si je decidais de traverser l'Afrique du nord au sud au volant d'une Paykan.
Avec un enthousiasme extraordinaire, ils ont plus porté leurs motos qu'elles ne les ont emmenés sur les routes asiatiques. Une des deux motos a carrément laissé son moteur sur la route lors du passage d'un rond point! Ce sont deux véritables épaves que j'ai pu voir garées près de ma moto. Et comme ils n'aiment pas la simplicité, ils sont partis sans carnet de passage en douane, le passeport de la moto indispensable dans ces pays, ce qui leur a occasionné de très longues négociations avec les autorités douanières.
Chapeau bas , Axel et Mathieu. Vous êtes maintenant armés pour affronter n'importe quel autre périple et la vie en général.

Orumiyeh (Iran) 26 mai 2002 16h30

Il est temps que je quitte le territoire iranien. Aujourd'hui, entre Hamadan et Orumiyeh, j'ai traité de tous les noms d'oiseaux certains automobilistes irrespectueux ( le mot est faible) et les plus privilégiés ont même eu droit à des gestes classés X!
Heureusement qu'en Iran, les routes sont larges, droites et que la densité de circulation est moindre que chez les Pakistanais car, grosso modo, on retrouve le même comportement suicidaire.
Je pense d'ailleurs que l'étude des automobilistes de cette région pourrait être un sujet de thèse intéressant pour des étudiants en sociologie. Je propose quelques pistes de recherche à certains d'entre eux tombés par erreur sur mon site. A moins que justement ils ne soient arrivés ici car ils étudient les motivations qui poussent un motard à partir dans des contrées si lointaines.
A ce sujet, je leur conseille la lecture de " L'usage du monde" de Nicolas Bouvier; il explique ça bien mieux que moi et avec grand talent. Il écrit notamment " A mon retour, il s'est trouvé beaucoup de gens qui n'étaient pas partis pour me dire qu'avec un peu de fantaisie et de concentration, ils voyageaient aussi bien sans lever le cul de leur chaise. Je les crois volontiers. Ce sont des forts. Pas moi. J'ai trop besoin de cet apport concret qu'est le déplacement dans l'espace. Heureusement d'ailleurs que le monde s'étend pour les faibles et les supporte, et quand le monde, comme certains soirs sur la route de Macédoine, c'est la lune à main gauche, les flots argentés de la Morava à main droite, et la perspective d'aller chercher derriere l'horizon un village où vivre les trois prochaines semaines, je suis bien aise de ne pouvoir m'en passer".
Pour en revenir à nos moutons ( mais non, je ne suis pas bavard!), j'ai en tête quatre raisons:
- ils s'en remettent a Allah, seul habilité à décider de la vie et de la mort et adoptent une conduite irresponsable.
- les seuils de danger et de douleur sont repoussés dans l'inconscient collectif par rapport aux sociétés occidentales.
- Frustration d'une vie quotidienne étouffée par le pouvoir en place et besoin de compenser.
- Ils se vengent d'être obligés de conduire une Paykan en essayant d'en détruire le plus possible!
Avant cette ultime étape iranienne ( la frontière turque est à quelques dizaines de kilomètres ),j'ai revu hier mon ami d'Hamadan. Il était avec deux de ses copains. Désoeuvrés, ils se sont partagés un joint en attendant que la journée passe. Très triste.
Je sais que chez nous aussi il y a une jeunesse qui s'ennuie et se drogue mais, ici, le sentiment si fort qu'il n'y a pas moyen de s'en sortir est terrible.
Je me souviens de la réflexion d'un étudiant en médecine avec lequel j'avais passé la soirée il y a quelque semaines:" J'ai travaillé très dur pendant deux années pour réussir le concours d'entrée à la faculté car je savais c'était l'unique moyen de pouvoir, un jour, quitter mon pays".
Je ne sais pas si mes rencontres sont très représentatives de la jeunesse iranienne, mais je me dis que quand le rêve le plus profond d'un jeune est d'abandonner son pays, le mal est profond.
Mon visa expirant demain et n'ayant aucune envie ( vraiment aucune!) de rendre visite aux fonctionnaires iraniens, je vais passer la frontière turque demain. Là, je vais ralentir la cadence car, ces derniers jours, le rythme a été un peu rapide.
A bientôt.
Christian.

Tatvan (Turquie) 27 mai 2002

"extrait d'un email"
La Turquie m'accueille une nouvelle fois. Je suis arrivé à Tatvan tout à l'heure.

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Un peu fatigué après ces longues étapes, je vais plus doucement me diriger vers Nemrut Dag demain, puis la Cappadoce où je compte me poser quelques jours.
Le lit de ma chambre d'hôtel a l'air très confortable, je m'en vais de ce pas le tester!

SalinUrfa ( Turquie) 28 mai 2002

J'avais oublié à quel point régnait une grande douceur de vivre dans ce pays où les habitants ont en eux une grande gentillesse teintée de discrétion.
Ici, les femmes sont femmes, pas des masses informes cachées derrière de sombres tissus. Il y a deux catégories: celles qui s'habillent à l'européenne et les traditionnelles mais l'important est qu'elles font elles mêmes le choix; ce ne sont pas quelques hommes à la tête d'un Etat qui s'arrogent le droit d'imposer un code vestimentaire aux femmes du pays.
Plus on reste dans un pays et plus on se sent concerné par les injustices, les abus,la dictature d'Etat et je commençais à ne plus supporter cette politique qui restreint tellement la liberté des individus en Iran.
Je respire un peu mieux en Turquie. Quoique. La traversée du pays Kurde a été l'occasion de remarquer les nombreux blindés de l'armée garés au bord de la route, le canon pointé vers la montagne. Je n'en avais pas vu autant à l'aller, ils devaient etre camouflés sous l'épais manteau neigeux du moment....
Connaissant le goût prononcé des autorités turques pour le dialogue, il ne doit pas être tous les jours facile être kurde dans la région.
Et pourtant, que de merveilleuses rencontres avec ce peuple, comme avec les Pakistanais, les Iraniens, les Turcs. En fait, je réalise au cours de mes voyages que l'immense majorité des terriens aspire à une vie paisible, en harmonie avec leur prochain. Quelques uns, assoiffés de pouvoir, tentent d'imposer leur conception des choses. Dans le meilleur des cas, en démocratie, le peuple est là pour surveiller leurs agissements mais dans ces pays autoritaires, ils s'arrogent le pouvoir de nuire à leurs concitoyens,d'édicter des textes restreignant les libertés et de déclarer des guerres dont le peuple n'a rien à faire.
En Iran comme en Libye il y a quatre ans, j'ai été profondément choqué par cette vie "misérable" subie par des millions de personnes.
A SalinUrfa, j'ai retrouvé avec plaisir l'atmosphère très syrienne de cette ville. Est-ce la proximité de la frontière, mais j'ai trouvé que le bazar faisait plus souk si vous voyez ce que je veux dire.
Hier, le passage de la frontière d'Essendère a toujours été aussi folklorique; tout d'abord, un no man's land de 9 mètres carrés dans lequel je me suis vu enfermé avec ma moto après avoir quitté l'Iran en attendant que ces messieurs du pays voisin daignent venir m'ouvrir, ensuite les fonctionnaires interrompant à regret leur repas du matin pour remplir quelques documents et enfin le petit garçon d'un douanier chargé d'ouvrir les grilles une fois les formalités accomplies!
J'ai retrouvé une montagne superbe dans ses couleurs printanières, avec de multiples tons de vert. Ce fut un véritable plaisir d'enchaîner les virages dans ce paysage, un oeil sur la route, un autre admirant qui le torrent, qui le village ocre sous le soleil levant, qui le lac avec en fond un pic enneigé. Et plus besoin d'attendre le pire du véhicule arrivant en face; ici, on roule (enfin!) normalement et mon coeur a retrouvé un rythme cardiaque plus raisonnable!

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Demain, direction le site de Nemrut Dag perdu dans la montagne.
Le voyage se termine doucement mais j'ai bien l'intention d'en profiter jusqu'au bout!

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A bientôt.
Christian.

Göreme (Turquie), 31 mai 2002



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Il fait nettement moins froid qu'au mois de mars et c'est avec grand plaisir que j'ai monté ma tente pour deux jours de repos minimum dans cette région. Avant, je suis monté à Nemrut Dag. Il y a plus de 2000 ans, un roi a décidé de se faire enterrer tout en haut d'une montagne, à 2150 mètres d'altitude, pour se rapprocher des Dieux. Les rois ont de drôles d'idees, comme les hommes d'ailleurs, mais eux ont souvent les moyens de les réaliser. Cinq statues représentant des divinités sont posées là haut; il ne reste plus que les têtes et cela leur donne un côté émouvant alors qu'elles semblent contempler pour l'éternité le soleil se coucher chaque soir.

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J'ai passé un long moment en leur compagnie dans le silence de la montagne....jusqu'à l'arrivée de paquets de touristes piaillant à qui mieux mieux. J'ai préféré battre en retraite. Un peu plus bas, sur le parking, j'ai rencontré un groupe de motards francais en BMW arrivés ....en minibus, sauf l'un d'entre eux plus courageux que les autres.
Il faut dire que les 10 derniers kilomètres grimpent rudement et que la route pavée devient rapidement un champ de pavés sur lequel on est bien secoué. J'y serais monté en Ducati, sur que je perdais la moitié de la boulonnerie ( n'est ce pas, Eric!!).
Puis une douce soirée dans un petit camping qu'on appellerait "à la ferme" chez nous où trois vaches broutent autour de la tente et où la vie s'écoule paisiblement. J'ai eu du mal à en sortir de cette très belle région et je me suis perdu pendant trois heures sur des petites routes qui se transformèrent en pistes . Mais l'endroit donne vraiment envie de s'y poser pour quelques jours.
Je vais parler de Titine avant qu'elle ne fasse sa crise de jalousie: hier, nous avons fêté, d'abord ses 150 000 kilomètres, puis quelques heures après les 25000 kilomètres du voyage. Elle mériterait un nettoyage en règle mais semble capable de me ramener à la maison. Je croise les doigts.
A bientôt.
Christian.

Tarbes (France), 17 juin 2002.

Je suis arrivé au bout de ce très beau voyage il y a quelques jours.
J'ai encore la tête remplie d'images, de rencontres , d'émotions.
Il va me falloir encore un peu de temps pour reprendre le rythme d'une vie plus routinière mais, après avoir vécu ces quatre mois extraordinaires, j'ai le moral au zénith.
Titine se porte bien après ces 29000 kilomètres de voyage et elle m'a glissé à l'oreille qu'elle ne serait pas contre une prochaine petite virée pour ne pas perdre la main.

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Vive le voyage.
Christian.